Un blogue sur l'industrie du jeu vidéo québécoise par Mario J. Ramos

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diversité, équité et inclusion dans l'industrie du jeu vidéo québécoise une étude par gabrielle trépanier-jobin

Une étude fait l’état des choses sur la diversité, équité et inclusion dans l’industrie du jeu vidéo québécoise

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image à la une : Gabrielle Trépanier-Jobin

Gabrielle Trépanier-Jobin, professeure en jeux vidéo à l’École des Médias de l’UQAM, vient de publier une étude qui plonge en détails sur l’état des choses dans l’industrie du jeu vidéo québécoise en ce qui a trait aux pratiques de diversité, équité et inclusion dans les petits et grands studios de jeux vidéo.

L’étude se base sur un sondage mené auprès de 1532 employé.e.s dans 57 studios différents dans l’industrie du jeu vidéo québécoise, ainsi que sur 17 entrevues menées auprès de gens ayant vécu des problèmes liés à la DEI (diversité, équité et inclusion) au seins de studios de jeux.

L’objectif est non seulement de dresser un portrait actuel des enjeux de DEI dans l’industrie vidéoludique québécoise, mais également d’identifier les problèmes structurels.

Quelle est l’importance accordée à ces enjeux dans les studios et quelles mesures sont mises en place? L’étude complète est disponible ici.

Je me suis entretenu avec Gabrielle Trépanier-Jobin à propos de son étude.

Mario : Qu’est-ce qui vous a motivée à réaliser cette étude?

Gabrielle : Les problèmes de sexisme et de harcèlement dans l’insdustrie vidéoludique étaient bien connus depuis plusieurs années, notamment grâce aux témoignages en ligne poignants d’employé.e.s ou d’ancien.ne.s employé.e.s. Toutefois, il manquait des données statistiques pour bien cerner l’ampleur de ces problèmes et avoir une meilleure idée de la proportion de personnes touchées. C’est principalement ce qui m’a motivée à sortir de ma zone de confort pour entreprendre une recherche quantitative basée sur deux sondages.

Mario : Quels défis et difficultés avez-vous rencontrés?

Gabrielle : Le plus grand défi à relever fut celui de récolter un très grand nombre de réponses afin de pouvoir généraliser les résultats à l’ensemble des employé.e.s des équipes de développement. En laissant le sondage circuler durant plusieurs mois à l’été 2021 et en contactant plus de 2000 personnes par messagerie sur Linkedin, nous avons réussi à sonder 1532 employé.e.s sur environ 10 800. C’est un exploit dont nous sommes très fières. Nous sommes d’ailleurs très reconnaissantes envers tous ceux et toutes celles qui ont pris le temps de répondre.

Mario : Trouvez-vous que le portrait global est plus positif ou négatif; pourquoi?

Gabrielle : Certains résultats sont inquiétants, notamment ceux mettant en lumière les écarts significatifs entre les hommes, les femmes et les personnes non-cisgenres concernant : les problèmes de santé mentale, l’inéquité salariale, le traitement différentiel, l’accès à la parole, le sentiment de vulnérabilité à la discrimination et le harcèlement sexuel. D’autres résultats sont plus encourageants, notamment l’importance accordée à la diversification des équipes de développement par les employé.e.s et les dirigeant.e.s, la mise en place de mesures pour favoriser la DEI dans de nombreux studios, et la similarité des taux de satisfaction des hommes et des femmes quant à : leurs conditions de travail, le respect de leurs collègues, le soutien de leurs supérieurs et la reconnaissance obtenue. 

Mario : Une des conclusions du rapport est que la majorité des femmes entamant un programme d’études en jeux vidéo abandonnent; qu’est-ce qui explique cela et quelles seraient des pistes de solution?

Gabrielle : Il y a bel et bien une page du rapport qui concerne le phénomène de « fuite à la source », mais c’est une donnée qui provient d’une recherche de Weststar et Legault (2008). Une des solutions pour contrer ce phénomène serait de recruter davantage de femmes dans les programmes d’études en jeux vidéo afin d’éviter qu’elles se retrouvent seules dans un groupe d’hommes. Pour montrer aux jeunes filles que ce milieu de travail leur est accessible, les studios de jeu peuvent mettre de l’avant des femmes qui ont une carrière enviable dans l’industrie sur leur site web ou lors d’événements promotionnels par exemple.

Mario : Une autre conclusion du rapport est que la situation des femmes est moins défavorables que laisse croire la couverture médiatique. Comment ce constat et le précédent (abandon scolaire) sont-ils réconciliables?

Gabrielle : Chaque cas de harcèlement, de discrimination et de sexisme est un cas de trop. Il ne faut donc pas minimiser la gravité de ces problèmes dans l’industrie du jeu. Cela dit, la couverture médiatique de ces phénomènes, qui focalise beaucoup sur des témoignages percutants, donne l’impression que toutes les femmes travaillant dans les équipes de développement font inévitablement face à ces obstacles. Or, la recherche démontre que ce n’est pas le cas pour la majorité d’entre elles. La discrimination, le sexisme et le harcèlement ne sont pas des fatalités avec lesquelles les femmes de l’industrie du jeu doivent nécessairement composer.

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